Formé en 2000 à Paris, NLF3 est le groupe instrumental des frères Nicolas et Fabrice Laureau, accompagnés depuis 2006 par le batteur Jean-Michel Pirès. Le trio explore une musique cyclique, texturée, à mi-chemin entre bande originale et transgression rock psychédélique, empreinte d’électronique. Après deux albums remarqués, leur ciné-concert sur Que viva Mexico! de Sergueï Eisenstein fait le tour du monde. De nombreuses tournées et créations suivent, accompagnées de sorties d’albums. NLF3 dévoile sur scène comme sur disque, un univers atmosphérique à l’instrumentation ouverte. Guitares électriques, claviers vintage, percussions et effets électroniques y inventent pulsations et mélodies en apesanteur, jouant autant sur les densités que sur le minimalisme.
A quelques jours de l’an 2000, les trois musiciens Fabrice Laureau, Nicolas Laureau et Ludovic Morillon se donnent rendez-vous pour mettre en œuvre de nouvelles idées dans leur studio parisien PUSH de la Porte de la Chapelle. Les principes de base sont simples : expérimenter sans schéma préétabli et enregistrer sans but précis. Personne ne pouvait alors imaginer que le projet NLF3, né de ces sessions inaugurales, serait toujours actif vingt ans plus tard. Ainsi paraît Part 1 – Part 2, premier (double) album-manifeste, à la fois catalogue de recherches et nuancier d’émotions, où les titres des compositions ne sont désignés que par de simples chiffres.
Deux ans plus tard, c’est le même dispositif, enrichi d’un ordinateur permettant d’effectuer du montage ou d’utiliser des sons MIDI, qui donnera lieu à la production de Viva !. Le visuel, conçu par le graphiste Gaspard Augé, convoque psychédélisme et illustration graphique à travers l’éclosion d’une fleur imaginaire évoquant simultanément les univers du krautrock et de la musique électronique. La tournée de Viva ! amène le trio à une carte blanche pour la création d’un ciné-concert. NLF3 choisit alors d’inventer une musique pour le chef d’œuvre inachevé d’Eisenstien Que Viva Mexico !. Après des représentations en France, la création fait le tour du monde. C’est précisément en 2006, pour cette tournée que Jean-Michel Pirès devient le batteur de NLF3. Des sessions d’enregistrement au studio Microbe débouchent sur la parution du EP Echotropic en 2008 puis de l’album Ride On A Brand New Time en 2009. Elles reprennent le postulat des premières improvisations, tout en apportant une dimension plus mélodique, au travers de changements d’accords qui viennent défier les rythmiques répétitives. L’instrumentation s’ouvre encore, avec l’apparition du kalimba (piano à pouce) et l’apport de plusieurs claviers vintage. Les voix se font incantatoires et une euphorie diffuse traverse les pistes, trouvant son pendant visuel dans les dessins au feutre de Yu Matsuoka, qui ornent les pochettes du groupe à cette époque. Le trio revendique alors ouvertement dans ses interviews une foule d’influences, de la musique répétitive au rock expérimental, de Laurie Spiegel à Brian Eno, de Sonic Youth à Can, de l’afrobeat de Fela Kuti au tropicalisme de Tom Zé.
En 2010, de retour d’une longue tournée, les trois membres de NLF3 se lancent rapidement dans la conception de Beautiful is The Way To The World Beyond, un nouvel album pétri de riffs de guitares électriques et de boucles minimales, témoignant de l’inspiration d’un groupe hyper-actif et épanoui. Le visuel en est conçu par les frères Laureau eux-mêmes, qui façonnent un assemblage de typographies et de petites formes géométriques éclatées évoquant des soucoupes volantes. Ce qui intéresse le plus le groupe est toujours sa prochaine destination. On les retrouve en 2011 sur le sombre et néanmoins éloquent Beast Me, dont le visuel est constitué d’une collection de têtes de mort en sucre. En 2012, NLF3 se penche en compagnie d’Erik Minkkinen (Sister Iodine) sur le film expressionniste Der Golem pour une nouvelle série de ciné-concerts. Il faut attendre 2014 pour voir paraître un nouvel opus au titre et à la pochette roses (œuvre des graphistes Twice), le bien nommé Pink Renaissance qui fait la part belle aux mélodies entêtantes et à l’espace, savamment orchestré et enregistré au vert loin de la capitale, puis au studio Midilive. Même dispositif mais résultat différent pour Waves Of Black And White en 2017 et son noir et blanc contrasté, souligné par un son ténébreux et aride, à l’image des rochers photographiés par Fabrice pour la pochette, rappelant sous l’égide d’Aristote que « la Nature ne laisse rien au hasard ».
Nouveau changement contextuel pour le nouvel album ABCDEFG HI ! : alors que Nicolas est occupé avec le danseur Yves Musard, Fabrice avec ses performances solo et Jean-Michel Pirès par les tournées de Bruit Noir, les trois comparses décident dans un premier temps de travailler séparément. Dans une démarche quasi-épistolaire, ils se prêtent au jeu d’une correspondance musicale, mettant en forme des morceaux à distance en ajoutant des éléments à tour de rôle et en toute confiance. Chacun dans son environnement, avec ses instruments, étoffe lignes mélodiques, rythmes et autres arrangements. Pour la première fois de son histoire, le trio n’est pas réuni au sein d’un même espace pour l’étape de recherche et de composition, même si l’album sera finalisé collectivement au studio PUSH à Paris. Par-delà l’originalité des propositions, l’utilisation du field recording, de sons folk (mandoline, guitare) ou d’un piano acoustique vient s’intégrer harmonieusement à l’univers électrique et électronique du groupe, sa marque de fabrique demeurant cet alliage de motifs répétitifs ou saccadés et de plages atmosphériques, nourris par un panel de sons au spectre large. Consécration d’une griffe singulière et originale, ABCDEFG HI ! renoue aussi avec le principe inaugural de ne pas donner de titres aux morceaux, ici désignés par de simples lettres classées par ordre alphabétique, afin que l’imaginaire de l’auditeur reste le plus vierge possible avant leur écoute. Cet album, né d’une envie commune de ne pas s’enfermer dans un schéma établi, continue d’explorer leurs possibles. À cet égard, le morceau HI ! ne vient-il pas conclure le disque, comme une invitation à une nouvelle étape ? Pour clore ce nouveau chapitre de son histoire, NLF3 nous dit « HI ! » plutôt que « Good-Bye ».